Ne nous égarons pas dans les détails décoratifs : je suis un solitaire de bonne compagnie. Faut pas trop me courir sur le haricot, c'est tout !
Georges et Monique STAHL - Sculpteurs verriers
Le Village
07110 LABOULE
LABOULE DE CRISTAL *
Le village s’accroche à l’escarpement du Tanargue. 120 âmes qui tutoient Taran, cousin celtique de Jupiter à qui, dit la légende, la montagne devrait son nom. Au dieu du tonnerre et des éclairs Georges parle presque en égal : il est adjoint au maire (bonjour Jean-Pierre). Ici, nombreux sont ceux venus de loin ; mais la sagesse séculaire du pays les imprègne. Au dieu vernaculaire et ses humeurs primaires on concède sans barguigner la primauté de l’arrosage et l’administration des sangliers. Les hommes, eux, s’attachent patiemment à façonner leur vie. L’été dernier, ce qui m’a sauté aux yeux en découvrant le site ce sont les bonzaïs de Georges, groupés sur la murette en face de la maison.
(En référence, pour illustration actualisée : Vase au bonzaï - sphère cristal, diamètre 40, hauteur 43.)
Georges et Monique, c’est un double sourire, une complicité évidente et gourmande. Dans l’atelier, le moule attend le cristal brut de Lalique. Eux ont fondu depuis longtemps leurs deux parcours. Georges, le Nancéien, et Monique, la Champenoise, ont choisi la pâte de verre « parce qu’elle est une lumière qu’on peut travailler lentement. Elle est durée, labeur, elle oblige à avoir un projet qui tient la route jusqu’au bout. » Une voie ouverte il y a quinze ans dans leur cheminement de céramistes. « A la recherche de la transparence, et de la lumière, nous cherchions à mélanger le verre à la porcelaine et la faïence ».
Profitons du portrait qu’a su faire d’eux Noël Neil :
« L’un est poète et philosophe, tourné vers l’Asie et l’Orient, souple et subtil. S’il adore la technique, c’est de façon très empirique et pour l’émotion de la recherche plus que pour la tranquillité du résultat. Il sait dormir au pied du four, l’ouvrir à deux heures du matin et vibrer. Un peu incohérent, et souvent tendre. Il est sable mouvant, mouvant, coulé !… ou c’est peut-être l’autre !
L’autre, vous dira-t-on, est le côté sculptural et structural, le côté modelage aussi. Les pieds sur terre, et terriblement spontanée, et travaillant par à coups. Comme une souris dans l’atelier, elle trottine sur son chemin, modelant en terre ou en cire petits arbres et petites fumées. Mais si c’était l’un ?
L’un, c’est sûr, fait son marché, déniche ses poissons à belle gueule, et moule ensuite ses truites en pâte de verre. Passion des formes, ascendant Poisson !
L’autre, c’est sûr aussi, soumet les dés du hasard aux lois de l’assemblage et de la nécessité. Goût du nombre d’or, ascendant Stahl !
Tous deux ont fait le long chemin de joie de la faïence au grès, à la porcelaine et, enfin, au verre. Partir de 1000 degrés pour aboutir à 1400. Ascension périlleuse ! Le grand combat de l’artiste et de la matière, façon Bernard Palissy reconverti dans le cristal, lançant avec amour des poissons bleus qui traversent le miroir et des poissons jaunes qui y laissent leur queue. Un Bernard Palissy qui aurait troqué ses armoires contre des algues sur présentoir et des coupes blanches à quatre pieds d’azur.
Leur reviennent, à coup sûr, ces montages de sculptures sur verre, où la transparence parfaite du cristal le dispute au velouté moulé, polissé, gravé de la pâte de verre ; où la tendance figurative et organique, qui fait proliférer aujourd’hui les poissons, algues, ronds dans l’eau et cordes moulées, comme, hier, les cheminées avec leurs fumées, fraternise avec la tendance abstraite qui assemble les cercles lunaires, les cônes solaires irisés ou les bâtonnets bleutés.
Georges et Monique Stahl sont les lutins du verre. Ils créent leur alphabet des rêves en bondissant de la bascule au pendule. Ils ont chaussé les fameuses semelles. C’est sûr ! »
* Fragment d'un article que je leur avais consacré en avril 2002.
Comme le temps passe !
Hier, ce n'est pas sur un marché que j'ai retrouvé Georges mais dans un Hyper où il cherchait... des fraises. Non mais quelle horreur, des fraises en Hyper !
Bises généreuses et rieuses, nous nous sommes pardonnés de nous trouver là.
Il avait de bonnes excuses. Pas moi. A moins que...
...ce soit l'occasion de vous les faire mieux connaître.
Et, pour commencer, laissons-nous glisser de quelques années.
Le temps, les amis, c'est un toboggan. Je viens de prendre seize ans sans m'en rendre compte.
Qu'à cela ne tienne, il y a de la beauté au bout du chemin.
+ une commande livrée l'an dernier :
Tu voulais voir Monique ?... Ben, tu verras Georges, tout comme moi hier.
Hé, y a pas de raison !
Je n'ai pas trouvé mieux comme clap de fin. Voilà, "tu peux fermer" maintenant.
¤
Ajout du 11.06 :
Tchin, Jaq !
Manque plus que "la rouge purée septembrale".