Ne nous égarons pas dans les détails décoratifs : je suis un solitaire de bonne compagnie. Faut pas trop me courir sur le haricot, c'est tout !
Par Géhèm
C'est de saison, enfin !
L'occasion d'évoquer Le déjeuner sur l'herbe (ultime phase) présenté lors d'une exposition de groupe en 2003 par l'ami René Mirabel.
Un commentaire tout récent sur un post déjà ancien : Un voile sur les pots de chambre des artistes ?
ainsi qu'une longue conversation, hier soir, avec René m'ont donné envie d'exhumer un article-papier que je lui avais en partie consacré :
Je m’amuse toujours à entendre les jugements portés par ceux qui ne sortant jamais de leur chapelle en révèrent le bénitier et s’y abîment dans leur reflet. On voit ainsi deux formes d’ignorance satisfaite : celle qui s’éblouit de ne rien découvrir de plus haut que son propre point culminant et celle qui, dédaigneuse de ce qu’elle a mal digéré, s’alimente de ses seuls préjugés.
(...L’œuvre, quelques références au livre d’or...)
Au sol, un carré de mousse et d’herbes folles dans un cadre de bois plastifié d’un mètre de côté avec, en son centre, un étron. Eclatante ruralité du propos, réjouissante antithèse du champ de lavande esthétisé, référence explicite au scandale provoqué en son temps par Manet, je ne crois pas tromper la pensée de René en indiquant qu’il n’y avait là matière qu’à une tempête dans un abreuvoir et à des soubresauts effarouchés d’employé de sous-préfecture constipé. Par le filtre de l’hyperréalisme pictural, voire de la photographie, on aurait certes répondu pareillement à l’intention mais on en aurait, à l’évidence, affaibli l’effet. Le procédé a rallié tous les rieurs, ainsi de celui-ci : Mirabel éclaire cette exposition de son humour ravageur. Ce qui n’a pas été la perception de tous : Il ne manque que l’odeur à la merde exposée dans le coin à gauche. Ignoble et inutilement choquant (reconnaissance, au passage, d’un véritable « savoir-faire »). Ainsi encore deux sentences à l’emporte-pièce, unies dans leur anonymat et leur cacographie : Mirabel tu ressemble à ta merde (d’un physionomiste sans doute distingué mais peu courageux) et Ces dégueulasse. Merde déplacée. Ne correspond pas à l’art… signé Une inconnu (dont nous regrettons qu’elle n’ait pas eu le loisir de développer la conception immanquablement originale de l’art que laissait espérer l’ambiguïté de son orthographe). Plus référencé, l’étonnement d’un peintre apparemment sûr de l’intemporalité de son style ou de l’avant-gardisme de ses recherches : Eh, les gars ! on est en 2003 pas en 1923. (Allusion au dadaïsme qui n’est pas infondée, mais beaucoup moins juste que le renvoi à l’année 1961 qui vit l’Italien Piero Manzoni exposer, sous le titre Merda d’artista, plusieurs boîtes métalliques operculées et numérotées dans lesquelles étaient conservés au naturel ses propres excréments, et totalement déconnectée de l’actualité internationale). Je suis tout aise d’avoir trouvé, au dernier jour de l’exposition, la synthèse la plus ouverte, faite par un adepte de l’Arte Povera : Bien que tous les exposants méritent des compliments, qu’ils veuillent bien m’excuser si je ne m’adresse qu’à René Mirabel dont je suis et admire les productions depuis un certain nombre d’années… L’espace me manque pour reproduire l’intégralité de ses arguments qui, pour l’unique fois, s’étendaient à la seconde œuvre exposée par René,
Intimisme n°38,
mais ce raccourci aura peut-être la vertu de ramener certaines des autres réactions relatées à l'exiguïté de leur domaine.
Je conclurai en m’amusant de l’inquiétude manifestée en ma présence par un visiteur, à propos de l’objet sur lequel j’ai jusqu’ici tenté d’éviter de glisser :
- Ce n’est pas une vraie ?
- Mais non, c’est un plâtre.
- Ah bon ! (soupir de soulagement).
- Ça a été d’autant plus douloureux.
- … ?
Je n’aurai pas la cruauté de vous tendre un miroir. Des fois que vous y retrouviez la mimique de ce brave homme !
Au fil des années, René Mirabel a construit et continue encore à enrichir une œuvre considérable que Gilles Plazy a déjà célébrée dans le n°28 de Cimaise, sous le titre : René Mirabel, la rigueur, la tendresse et l'humour. Il ne montre que peu son travail, d'une grande variété, et ce toujours au gré de ses envies. J'espère trouver le temps de vous en présenter d'autres aspects. Prépare le champagne, René !
Parmi ses principales expositions :
1967.
IVe Salon International de Monte-Carlo. Achat d’une toile par S.A.S. la Princesse Grace de Monaco.
1968.
Biennale itinérante pour le Continent Américain.
1969.
Salon international de Barcelone.
1988.
Salon Grands et Jeunes d’Aujourd’hui, Grand Palais, Paris.
1990.
Exposition personnelle, Galerie Peinture Fraîche, Paris.
1992.
Dijon, Hôtel de la Cloche, exposition personnelle (présentée par Michel Enrici, Directeur de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Dijon.)
Paris : Bibliothèque Nationale : De Bonnard à Baselitz – Chefs-d’œuvre de l’estampe du XXe siècle.
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