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- Je n’ai aucun compte à vous rendre. Vous me faites chier, les biquets ! C’est vous qui me faites becter, qui m’habillez, qui… ? Et puis merde !
Pas trop polie ! Le regard noir, des éclairs dans les yeux : c’était bien le jour ! Il leur semblait qu’elle aurait pu d’abord montrer un peu de compassion.
- C’est une tuile ! se calma-t-elle.
- Il a peut-être une chance de s’en tirer, dit Momo.
- Je serais lui, que je ne me le souhaiterais pas ! On voit que vous ne connaissez pas sa baronne : pouvoir le faire manger jusqu’à perpette dans le creux de sa main, trop contente !… Non, je parlais de notre emploi du temps, mes biquets.
Rien n’altérait son pragmatisme ! À d’autres qu’eux cela aurait pu faire froid dans le dos.
- C’est au contraire une circonstance opportune, dit Lu. Chômage technique, et qui sait jusqu’à quand ?
- Donc, le malheur des uns… commença-t-elle à énoncer.
- Ne fait pas le moine, compléta Momo.
- Ou quelque chose comme ça ! approuva Lu en rigolant.
Ce qu’ils pouvaient être gamins, tout de même ! Elle les observait, éberluée :
- Alors, on va pouvoir s’y consacrer à plein temps ?
- Et dès ce soir ! Ça nous changera les idées, dit Momo.
Pour sûr, avec ces oiseaux-là, elle avait eu du pif ! Comment rêver de parier sur de meilleurs chevaux ?
- J’annule mon programme pour les deux jours qui viennent et je m’installe à côté, claironna-t-elle.
On repoussa la table. On mit en branle la cassette. …La Villette ! La Villette !… À tour de rôle, ils dansèrent la java avec la petite, comme prévu dans le spectacle. Bon Dieu que ça faisait du bien ! Pause pétard. Vraiment du bien ! Reprise… Re-pause pétard… La nuit était tombée depuis longtemps.
Ils se regardèrent tous les trois. Il paraît que les grandes frayeurs exacerbent la libido. Ce n’était pas faux !